La stratégie d’évitement…

A chaque fois que je sens le conflit arriver, dans le travail ou dans ma vie privée, j’ai tendance à prendre la fuite. Pas plus tard qu’hier, à l’approche d’une réunion qui s’annonçait conflictuelle, je me suis arrangée pour la décaler d’une semaine, en prétextant une urgence. Les rangements dans ma maison, je déteste, je m’arrange toujours pour remettre au lendemain toutes ces tâches qui me paraissent être une montagne à gravir. A chaque fois que je sens que l’on va parler de maladie, cancer, je prends mes jambes à mon cou et change de sujet avant même qu’il n’ait été abordé. C’est plus fort que moi.

Et là ça me chicote. Finalement, est-ce qu’éviter, à tout prix, certaines situations ou sujets trop délicats est bénéfique ? Je sens bien qu’à chaque fois qu’une situation redoutée se présente, quelque chose se déclenche en moi de manière presque incontrôlable pour l’éviter ou la repousser. Y a-t-il une issue possible à ce type de situation que l’on appelle « stratégie d’évitement ? »

Qu’est ce que l’évitement en psychologie

Éviter une situation redoutée, fuir une situation conflictuelle, remettre certaines choses au lendemain, et cela de manière répétitive, peut s’apparenter à ce que l’on appelle une stratégie d’évitement.

Un mail urgent pour le travail ? Oh ça peut bien attendre ! Un problème de santé qui s’aggrave ? Je ne prends pas de rendez-vous médical. Les factures à régler ? Ça attendra demain. Ça vous parle ?

Mais de quoi s’agit-il exactement ?

Nous mettons de côté la stratégie d’évitement qui est une stratégie pour décaler ou post poser une action. Nous l’utilisons quand

  • Nous avons besoin d’un temps de réflexion face à une situation non maitrisée (le placement d’un parent en perte d’autonomie).
  • Ou nous avons besoin de temps pour donner une réponse (au boulot, une décision difficile de licenciement, ou un ado qui veut sortir le WE prochain…)
  • Nous faisons face à des personnes toxiques qu’il est bon d’éviter.
  • Ou encore nous manquons de temps pour parler d’un sujet sérieux et que ce n’est pas non plus le bon endroit ou le bon lieu.

C’est un peu décaler l’action à un moment ou toutes les conditions seront réunies pour que ça fonctionne.

Qu’est-ce que la stratégie d’évitement

En psychologie, l’évitement comportemental est « une conduite, consciente ou inconsciente, permettant à une personne d’éviter une douleur ou angoisse. Il s’agit d’une réaction de fuite permettant de soulager rapidement et temporairement un état ou une situation désagréable. 

Plus précisément, face à une situation redoutée, un mécanisme de défense se met en place en nous, afin d’éviter tout sentiment d’angoisse ou de peur.

Nous l’avons mentionné dans plusieurs podcasts sur la peur. Face à un danger, il y a 3 réflexes de survie que notre cerveau met en place, les fameux 3F : Fight, Freeze, ou Flight. C’est-à-dire combattre, rester figé ou fuir.

Dans la stratégie d’évitement, vous l’avez compris, c’est le F de Flight dont il s’agit.

Quoi de plus logique que d’éviter ce qui nous fait peur me direz-vous ?

Alors c’est vrai, l’évitement nous soulage sur le moment, on ne ressent plus l’état interne d’inconfort et on passe à autre chose.

La stratégie d’auto-évitement

Il existe enfin une stratégie d’auto-évitement, mise en place délibérément, dans le but de protéger l’estime de soi. Il s’agit de la stratégie d’auto-handicap ou de la jambe de bois.

Pour Jones & Berglas qui furent en 1978 les premiers à introduire cette notion, l’auto-handicap est une stratégie mise en place sciemment par l’individu pour préserver l’estime qu’il a de lui-même. Les stratégies d’auto-handicap sont généralement utilisées dans les situations où les enjeux sont particulièrement importants et où les impacts sur l’estime de soi sont susceptibles d’être les plus humiliants.

Autrement dit, la personne se mettant elle-même des bâtons dans les roues, prépare des excuses dues à des causes extérieures pour leur attribuer la cause de l’échec. Elle protège ainsi son estime d’elle-même et sa réputation aux yeux des autres. Nous avons tous en tête des exemples de sportifs qui justifient leur défaite par une cause climatique, un problème physique, un entrainement compliqué…

En cas d’échec, l’estime de soi est donc protégée et, en cas de réussite, elle est augmentée. Donc, quel que soit le résultat, elle sera préservée.

Il y a deux sortes de stratégie d’auto-handicap :

L’auto-handicap revendiqué

Une difficulté ou obstacle externe est utilisé comme justification au comportement d’auto-handicap tels qu’une maladie, une blessure, un stress ou le comportement d’autrui, un traumatisme d’enfance… Ici, la personne met en avant sa défaillance comme une excuse toute trouvée et se place en état d’impuissance.

L’auto-handicap comportemental

Ce type d’auto-handicap choisit également de blâmer une cause extérieure en cas d’échec. Mais il s’approprie tout de même les réussites éventuelles s’il y en a.

C’est le cas d’un sportif de haut niveau qui ne se prépare pas suffisamment à la compétition. S’il échoue lors de la compétition, alors il aura une bonne excuse, il ne se sera pas assez entraîné. Et son estime de lui-même sera « préservée. » Et s’il réussit, alors son estime de lui-même en sera renforcée.

A noter : les hommes s’engagent plus facilement dans des stratégies d’auto-handicap comportemental que les femmes (Harris & Snyder, 1986). 

Dans tous les cas, cette stratégie augmente énormément nos risques d’échouer, même si ce n’était pas le cas à la base.

Cela nous pousse à éviter les activités où nous sommes susceptibles d’échouer, et donc à devenir de plus en plus passifs. Ce comportement s’accompagne aussi d’une perte de productivité au travail, un repli sur soi, et un plus grand pessimisme vis-à-vis de l’avenir.

Poussé à l’extrême, cela nous conduit à entrer dans un cycle de compensation qui peut aller jusqu’à des addictions comme l’alcoolisme, l’excès de nourriture, la procrastination chronique, la victimisation…

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Comment fonctionne la stratégie d’évitement

Mais attention, ce soulagement n’est que temporaire et en réalité, l’évitement ne fait qu’empirer la situation.

Notre cerveau va en plus considérer que plus on évite un problème, plus ce problème est perçu comme dangereux. On va donc s’enfermer dans un cercle vicieux dont il sera impossible de se sortir tant la peur nous gouvernera.

Comme nous l’avons vu dans le podcast #18 Surmonter ses peurs, cette émotion de peur peut certes donner le signal d’un danger ce qui est bon en soi. Mais elle peut aussi être un réel handicap si elle provoque en nous des phobies et angoisses telles que cela nous paralyse et entrave tout élan vital et créatif.

Parfois même, notre cerveau déforme le réel danger.

Et d’ailleurs, à chaque fois qu’une situation redoutée et parfois ruminée à l’avance se présente, avez-vous déjà remarqué que cela ne se passe jamais comme on l’a imaginé ? Les études démontrent que seulement 3 à 7 % des pensées que nous anticipons arrivent réellement !

Donc nous avons tout intérêt à ne pas rester enfermé(e) dans cette peur si elle nous coupe de tout élan.

En pratiquant l’évitement, on crée un effet boule de neige. Plus on évite le problème, plus il prend de l’ampleur et plus il va être difficile de l’affronter.

Par exemple, quand je remets toujours au lendemain ma paperasse administrative, les tas de factures vont s’accumuler et un jour je vais avoir des retards de paiement. Sur le coup, cela peut paraître anodin mais en réalité les conséquences peuvent être importantes.

Comment vaincre l’évitement

Comment se sortir de ce schéma un peu systématique qui s’est mis en place ? De ce réflexe de survie pour nous protéger d’angoisses ou de peurs ?

Nous venons de comprendre que notre cerveau, même inconsciemment, met en place une stratégie d’évitement pour nous éviter la douleur et nous protéger.

Même si cette stratégie nous soulage dans le moment présent, elle nous empêche tout de même d’avancer et une sorte de malaise, voire de chute d’estime de soi peut finir par s’installer.

Alors comment faire pour aller à l’encontre de cet évitement et surtout aller de l’avant dans nos projets, dépasser nos angoisses et parfois même nos phobies ?

Quelles sont les stratégies de coping ?

Pour y répondre nous allons d’abord nous pencher sur la stratégie de coping.

Mais de quoi s’agit-il ?

Défini par Lazarus et Folkman en 1984, le concept de coping fait référence à la façon de s’ajuster aux situations stressantes et la mise en place d’une réponse pour y faire face.

Cette stratégie sert à nous protéger aussi bien physiquement que psychiquement.

Plus concrètement, dans le coping, il y a 4 manières de s’ajuster aux situations stressantes :

Se centrer sur le problème en agissant sur la situation 

Prenons le cas d’un entretien d’embauche. Dans la perspective de cet échange, je le prépare, je parcours tout le site de l’entreprise, je me renseigne, je liste des questions. Bref, je n’arrive pas les mains dans les poches. Le fait de préparer peut donc faire diminuer mon stress.

Gérer ses émotions pour essayer de retrouver du calme intérieurement

Toujours pour ce même entretien, je peux, juste avant l’entretien, faire un renforcement positif pour éviter de laisser le stress m’envahir. Pour cela, je peux essayer, quelques minutes avant, de me concentrer sur ma respiration. Je peux aussi me rappeler toutes mes qualités, mes compétences pour renforcer ma confiance ou encore aller faire une bonne séance de sport la veille pour évacuer.

Amy Cuddy, psychologue sociale et enseignante à Harvard (USA), défend que les postures dites « high power pose » comme s’étirer comme un chat le matin, prendre la position de superman ou être assis en formant un angle droit (le dos droit comme un i, les épaules relâchées et les jambes légèrement écartées) modifient nos niveaux d’hormones après seulement 2 minutes. Le taux de testostérone augmente et le niveau de stress diminue. Éviter d’être recroquevillé et avoir une attitude ouverte nous fait nous sentir plus confiant, moins stressé et plus compétent.  Essayez de changer votre état d’esprit grâce à votre corps en 2 minutes. Un défi facile à relever !

Fuir ou éviter la situation 

Dans certains cas, fuir ou éviter la situation peut être la meilleure solution.

Par exemple, face à une personne toxique ou à une discussion qui commence à s’envenimer, il sera plus bénéfique d’éviter ou de stopper une rencontre. Sur un trottoir, face à des individus qui paraissent suspects, j’ai tout intérêt à changer de trottoir !

Se faire aider 

De retour à la préparation de mon entretien d’embauche, appeler des personnes qui connaissent l’entreprise en question. Ou consulter mon oncle qui est en RH pour lui demander des conseils…. Avoir un point de vue extérieur… Tout cela peut m’encourager de pleins de manières possibles et m’aider à diminuer le stress face à ma situation.

Il n’y a pas de bonne ou mauvaise stratégie dans le coping. L’important est de trouver la plus efficace pour diminuer le stress !

Des idées pour faire face à la stratégie d’évitement

Une autre manière de faire face à la stratégie d’évitement est de prendre conscience que l’on s’est installé dans cette stratégie. Sans cette prise de conscience, il y aura toujours de bonnes excuses, ce sera la faute de l’autre ou d’un facteur extérieur… En faisant cette prise de conscience (qui n’est pas toujours évidente d’ailleurs car des schémas peuvent s’être installés de manière inconsciente), je vais alors pouvoir regarder le problème en face et apprendre à le dépasser.

Prenons le cas d’une femme qui prend une bonne résolution de 1er janvier d’arrêter de fumer !

Dans la stratégie d’évitement cette femme va rencontrer 4 grands facteurs qui vont l’empêcher de réaliser ce projet qui sont la passivité, l’attente, le schéma répétitif et la stagnation

Comment contourner les facteurs qui empêche de réaliser un projet ?

  1. La Passivité : elle prend la résolution mais concrètement ne se fixe pas d’objectif comme réduire petit à petit son nombre de cigarettes ou se faire accompagner… Le remède à la passivité est l’action. Cette femme va décider de mettre des patchs, lire des livres. Vous le comprenez, elle va accompagner sa décision de faits concrets.
  2. L’Attente : elle repousse le moment. Quand elle aura fini son dernier paquet de cigarettes, quand telle échéance sera passée… Le remède de l’attente est la gestion du temps. Pour ne pas repousser l’échéance elle va se fixer des deadlines. Par exemple, si dans un mois elle ne voit pas d’amélioration, elle passera à la cigarette électronique et ainsi de suite.

 

  1. Le schéma répétitif : à chaque fois qu’elle essaie d’arrêter de fumer, elle rechute. Pour ne pas tomber dans le schéma répétitif et rechuter comme les dernières fois, elle va prendre le taureau par les cornes et consulter un professionnel.

 

  1. Elle n’y arrive pas, elle stagne et se dévalorise. Enfin, pour ne pas tomber dans ce sentiment de stagnation, dévalorisation de soi, elle va associer sa démarche à des plaisirs. Car si le corps nous protège du danger, il aime aussi le plaisir ! #167 J’apprécie le plaisir Trouver des sources de plaisir peut alors être une bonne contrepartie à ce manque et besoin de nicotine. Elle compensera le sacrifice d’arrêter de fumer par des moments de pur plaisir : un cinéma, une sortie, un soin bref, un moment qu’elle va particulièrement apprécier.

 

Quand un accompagnement nécessite d’être mis en place car nous n’y arrivons pas seul, il existe beaucoup de techniques dans les domaines de la thérapie comportementale et cognitive pour nous y aider.

La méditation pour nous aider à soigner nos stratégies d’évitement

A titre d’exemple, le Yoga et la sophrologie permettent de travailler sur sa respiration. En effet, selon l’enquête « Frontiers in Psychology », la respiration aide à atténuer le stress et l’anxiété en réduisant les niveaux de cortisol. Prendre conscience de sa respiration, apprendre à mieux la contrôler, savoir ajuster la technique de respiration selon les moments, peuvent nous aider à nous sentir mieux dans notre corps et notre tête. #114 Je m’accorde des moments de méditation

L’action, la gestion du temps, l’accompagnement et le plaisir sont des bons moyens d’aller de l’avant et dépasser ces stratégies d’évitement qui se sont installées en nous.

La stratégie d’évitement en résumé

  1. Est repérable soit par sa fuite ou par l’auto-sabotage.
  2. Pour en sortir, je peux utiliser le coping, la prise de conscience, l’action ou la gestion du temps.
  3. Le meilleur antidote à la stratégie d’évitement est d’imaginer le plaisir ressenti quand nous en sortons .

A vous de jouer chers auditeurs, La carte de 2 minutes de bonheur vous propose cette semaine de nommer et d’éliminer une stratégie d’auto-sabotage mise en place.  Allez hop passez à l’action !  

La petite mousse :

Agatha Christie « Fuir nos problèmes est une course que l’on ne gagnera jamais »

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