Constat sur la notion d’ombre

La notion d’ombre a été peu étudiée dans les pays francophones, contrairement aux pays anglo-saxons. Pour Carl Gustav Jung, “ce n’est pas en regardant la lumière qu’on devient lumineux, mais en plongeant dans son obscurité. Mais ce travail est souvent désagréable, donc impopulaire”.

C‘est Jean Monbourquette, prêtre et psychologue québécois, qui nous permet d’avoir accès en français à ce concept. En effet, convaincu de l’utilité de cette notion qu’il a mis en application, tant dans sa vie personnelle qu’auprès des personnes qu’il accompagnait, il a décidé de partager ses connaissances sur le sujet.

Monbourquette a ce talent de rendre clairs des concepts complexes. Il sait aussi en diffuser une application très concrète, motivante et accessible.

Nous vous proposons donc aujourd’hui de vous partager à notre tour les enseignements que nous avons retenus de son livre “Apprivoiser son ombre”.

Qu’est-ce que l’ombre ? 

L’ombre est le côté mal aimé de soi

Elle est constituée de tout ce que nous avons refoulé par peur d’être rejetés par ceux que nous aimons ou que nous admirons. Par souci de plaire, de se conformer, d’être appréciés, d’être aimés. Nous avons donc mis de côté tout ce qui pouvait nous paraître “déviant, honteux ou répréhensible” aux yeux des lois et des règles de notre milieu de vie.

Nous intégré, par exemple, que penser à soi était égoïste, que pleurer était se montrer faible, ou qu’obéir était valorisé et que s’affirmer ne l’était pas. Nous avons pu aussi renoncer à développer certains dons, certains talents. Ceux-ci sont, de ce fait, restés tapis au fond de nous-même.

Vous voyez celui qui dit “j’ai toujours eu envie de faire de la sculpture mais mes parents trouvaient ça futile”. C’est en ce sens que, pour Monbourquette, l’ombre est comme un volcan. En effet, elle se traduit “une énergie psychique compressée, mais toujours vivante et active.” Il est donc nécessaire pour lui de savoir accueillir notre part d’ombre, de la refaire surgir dans notre conscience pour l’apprivoiser et en tirer toute sa richesse. Ne pas le faire serait prendre le risque qu’elle surgisse tel un torrent et nous envahisse à part entière.

L’ombre risque de créer des obsessions et des projections sur autrui

Il faut savoir qu’une ombre qui n’est pas accueillie risque de forcer le passage à un moment ou un autre. En réalité, elle peut créer des obsessions mais également des projections sur autrui. Par exemple, si j’ai refusé de voir certaines de mes qualités ou certains de mes traits de caractère, il y a de fortes chances que je les attribue à d’autres. Et chez cet autre, j’aurai tendance soit à les admirer, voire les idéaliser, soit à les mépriser. Je vais les voir se profiler sur des personnes qui, à mes yeux, deviendront ainsi fascinantes ou menaçantes. Ma perception du réel sera donc perturbée.

C’est la même chose quand nous projetons sur d’autres nos faiblesses ou nos défauts. Cet autre va finir par nous hanter et devenir insupportable.

Pour Monbourquette, c’est là l’origine de la majorité des conflits interpersonnels (NB : il y a  une différence entre projection et observation objective : je remarque son impolitesse mais elle ne vient pas me toucher ou m’affecter. Je ne suis donc pas dans une projection de mon ombre sur autrui).

 

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Changement de regard sur la façon d’apprivoiser son ombre

Et si nous décidions de “réintégrer notre ombre” ? 

Lorsque vient le moment de faire le bilan de sa vie, rares sont ceux qui sont 100% satisfaits. Vous avez sans doute aussi entendu parler de la crise de milieu de vie. Vous savez, ce moment un peu charnière entre deux grandes périodes de vie ! Pour les parents, elle correspond souvent à l’adolescence de leurs enfants. Il s’agit de cette période où ils commencent à vouloir voler de leurs propres ailes. Cela se produit aussi au départ des enfants (le nid vide).

Mais cette crise peut également se produire suite à un changement brutal dans la vie professionnelle. Ou encore après un accident physique ou psychique sur notre chemin de vie. Ce moment de rupture entraîne souvent son lot de doutes, de constats, voire pour certains, de regrets. Il peut alors être source de décisions et de changements.

À ce moment-là, posez-vous cette question pertinente : faut-il changer l’extérieur de moi-même ou dois-je commencer par plonger dans l’intérieur de moi ?

Regarder au fond de soi-même

Plonger en soi, c’est agir sur soi. Car, comme nous l’avons souvent dit, nous avons du pouvoir sur nous-même et non sur les éléments extérieurs.

Monbourquette propose pour cela, de vider “notre sac à déchets”. Celui-ci se constitue de tous nos refoulements inconscients (qualités, émotions, traits de caractère…). Il suggère de le recycler afin d’éviter de laisser pourrir et fermenter ces déchets qui finissent par nous empoisonner. Cette action va permettre de réintégrer notre ombre et favoriser notre croissance personnelle.

Il ne s’agit pas évidemment de tout faire voler en éclat ni de tout rejeter. Mais cela nous aidera à aller regarder plus au fond de nous-même. Nous verrons ainsi ce qui nous empêche d’être nous-même (par crainte d’être exclu de l’amour de nos proches, du groupe, de la société …).

Le dilemme du moi social et du moi intime

Nous avons bien sûr besoin de nous adapter à minima à notre environnement. C’est pourquoi notre moi social se construit nécessairement grâce à nos efforts d’adaptation aux normes éducationnelles, morales et sociales. La difficulté est quand ce moi social prend le pas sur notre moi intime. Or, si le moi social ignore le moi intime, notre ombre sera trop grande. Elle deviendra alors menaçante et créera des tensions internes et des dilemmes récurrents entre nos deux “moi”. Comme le rappelle Monbourquette, “on n’échappe pas à un dilemme en supprimant l’un de ses deux aspects”.

Et oui, vous l’aurez déjà peut-être compris, nous allons à nouveau avoir recours à nos talents d’équilibriste !

Trouver l’équilibre entre l’égo idéal et l’ombre

Pour ce faire, il est important de :

  • être dans une attitude d’accueil de nos mouvements intérieurs afin éviter tant le défoulement que le refoulement ;
  • agir selon la philosophie Zen, que nous adoptons par exemple pour gérer la colère. Ce put être s’abstenir d’agir sous le coup de la colère mais se garder de la refouler. Ou alors l’accueillir en soi pour l’apprivoiser (Bulle de Bonheur #27 Je gère ma colère) ;
  • sortir du mode binaire : aimer ou haïr, exprimer ses émotions ou les refouler. C’est également travailler ou se reposer, se donner aux autres ou prendre soin de soi. Ou enfin agir ou méditer, entrer en relation ou s’isoler … Ainsi vous acceptez que l’apparente contradiction est en fait complémentarité et que le “ET” peut remplacer le “OU” (j’aime ma famille et j’aime avoir des moments seule sans eux).

Cet équilibre permet à notre moi social de ne pas générer une ombre trop importante.

En ce qui concerne un enfant, le rôle de l’éducateur sera de l’aider à construire son moi social (s’adapter aux normes et valeurs de son milieu) sans étouffer son moi intime. Donc il l’accompagnera avec souplesse et dans le respect de ses aspirations profondes et de son émotivité (ta colère est légitime mais ton geste violent n’est pas acceptable – Bulle de Bonheur #5 sur les émotions et #27 sur la colère).

Notons que chaque famille est portée à favoriser l’expression de certains sentiments et à en bannir d’autres. Dans telle famille, il peut être impossible d’avoir l’air faible, souffrant ou encore d’avoir peur. Dans une autre, ce sera le contraire : être fort, rayonnant ou éclatant de santé sera moins toléré.

Trouver un équilibre entre son égo et son ombre

En pratique : quelles sont les stratégies pour identifier et apprivoiser son ombre ?

Les stratégies pour identifier son ombre 

Pour résoudre cette tension qu’exerce l’ombre sur l’égo, il faut, dans un premier temps, lâcher prise sur l’ego. Il convient d’essayer tant bien que mal que celui-ci admette de ne plus être au centre du psychisme et de vouloir tout gérer selon son point de vue (voir Bulle de Bonheur #25  je découvre le pouvoir du moment présent).

Et dans un second temps, nous avons besoin de  reconnaître que nous avons une ombre (“on ne peut changer à l’intérieur de soi que ce que l’on a d’abord accepté”).

Vous êtes d’accord avec ces deux préliminaires ? Alors nous vous proposons de suivre la démarche concrète de Monbourquette. Nous vous invitons à emprunter ses exercices pratiques pour découvrir et intégrer notre ombre et en faire une véritable force créatrice.

Les stratégies pour apprivoiser son ombre

1 – La prise de conscience

Prendre conscience que nos projections sont inconscientes (donc ne pas culpabiliser ou en vouloir à nos éducateurs, nos milieux) et qu’elles viennent de nous (et non des autres !).

2 – Identifier ses projections et les composantes de son ombre

Voilà quelques questions à se poser :

  • Quelles sont les qualités que je voudrais qu’on me reconnaisse ? Quelles sont celles que j’admire chez les autres ?
  • Quels sont les défauts que je ne supporte pas, en moi et chez les autres ?
  • Quels sujets de discussion ai-je tendance à éviter dans mes conversations ?
  • Dans quelle situation je me sens devenir nerveux, hypersensible, sur la défensive ?
  • Quelles sont les critiques me concernant qui m’agacent ou m’irritent ?

3 – Initier un dialogue avec son ombre

Imaginez-la comme une personne avec laquelle vous dialoguez. Et positionnez-vous comme un arbitre qui va veiller à réconcilier les deux parties (votre moi social et votre moi intime).

Vous pouvez aussi personnaliser votre ombre et vous en faire une amie (si je crains, par exemple, d’être mise à mal par un client qui viendrait mettre en doute mes compétences, je peux essayer de dialoguer avec l’ignorant qui est en moi, de l’accepter et refuser de lui faire de la place dans ma vie). 

4 – Identifier ses blessures

Vous pouvez “adopter” l’enfant blessé qui est en vous (Bulle de Bonheur #95 Je retrouve l’enfant en moi) ou encore identifier les blessures dont nous vous avions parlé dans notre posdcast Bulle de Bonheur #18 sur les peurs. Nous sommes, en effet, tous à plus ou moins grande échelle, les héritiers de peurs (ou blessures) existentielles identifiées par Lise Bourbeau dans son livre “les 5 blessures qui empêchent d’être soi même” :

  • la peur du rejet
  • la peur de l’abandon
  • la peur de l’humiliation
  • la peur de l’injustice
  • la peur de la trahison

5 – Utiliser le “et”

Sortez de la vision binaire qui amène à penser que des qualités, des émotions ou encore des désirs sont contradictoires et incompatibles, alors qu’ils peuvent coexister et être complémentaires. Prenez donc conscience de l’existence en vous de ces “opposés” (l’aide d’une tierce personne pourra être utile) mais aussi de cet opposé qui vous attire ou vous repousse chez l’autre. Il est intéressant de se demander ensuite si vous n’avez pas besoin de ce trait ou de cette qualité pour contrebalancer vos traits excessifs. Par exemple, je suis de nature généreuse et je supporte mal l’égoïsme. En prenant l’envers positif de l’égoïste, j’arriverai peut-être à me dire qu’il faut que je sache prendre du temps pour moi.

6 – S’exprimer avec la forme affirmative

Cela permet d’éviter de formuler des interdits et de générer les nombreux refoulements qui y sont attachés. Notre podcast Bulle de Bonheur #31 sur la communication positive vous rappellera ou vous donnera les clés pour agir en ce sens. Quand je dis « j’ai du mal à rédiger ce rapport » au lieu de « je ne suis pas capable de rédiger ce rapport », nous constatons bien que la 1ère formulation pousse à une action, contrairement à la 2ème qui ferme la porte à toute sortie de la problématique.

Ce voyage explorateur au fond de nous-même peut possiblement nous faire peur ou nous paraître long. Mais quel bonheur de découvrir une vraie richesse intérieure  “capable de nous faire rebondir en goût de vivre, d’aimer, de lutter et de foncer dans l’avenir dans cette foulée de vie” !

Allez hop je me lance

Si je résume

  • L’ombre est le côté caché et mal aimé de notre personnalité.
  • Reconnaître et accueillir notre ombre c’est apprendre à l’écouter, l’accepter et dialoguer avec elle.
  • Apprivoiser notre ombre, permet de mieux nous connaître.

À vous de jouer ! Vous avez 2 minutes pour penser à une qualité que vous admirez très fort chez quelqu’un. Ou à l’inverse, un défaut qui vous met dans tous vos états. Essayez d’identifier ce que ce mouvement intérieur vient révéler de votre ombre.

La petite mousse de cette semaine nous propose d’essayer de faire comme Ray Davis : « Aujourd’hui, je choisis de vivre dans la lumière de mes espoirs plutôt que dans l’ombre de mes doutes ». Ça se tente, non ?

Avec Bulle de Bonheur, prenez le temps d’être heureux !

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