La générosité

La générosité… Avez-vous pensé à prendre du temps pour vous ces dernières semaines ? Vous savez, vous arrêter, prendre le temps de faire silence, de penser à vos projets, vos désirs, votre histoire. Bon, et… les autres dans tout ça ?

Alors oui, je suis encouragée à être épanouie dans ma vie professionnelle, à trouver ma “mission de vie”. Dans la sphère familiale : à être en même temps une mère qui dépote et une mère attentive aux besoins de mes enfants.  Et j’irai même plus loin, aujourd’hui, être « un peu égoïste » est même encouragée, ou plutôt largement déculpabilisée. A l’inverse, certains trouvent tout cela bien trop nombriliste.

Ce retour à soi est-il compatible avec l’attention portée aux autres, avec la générosité ? Et là, ça me chicote. Si je donne trop, on me dit que je frôle le burnout. Mais si je ne donne pas assez, c’est moi qui ne me sens pas bien. Être généreux, qu’est-ce que cela veut dire, au fond ?

Constat

  • la générosité, qu’est-ce que c’est ?

J’aime beaucoup explorer les définitions du CNRS, qui met en ligne un lexique vraiment poussé. Il est illustré de beaucoup de citations et d’extraits littéraires. Au mot « générosité », je lis plusieurs explications.

    • La première, c’est la « grandeur d’âme ». Oubli de soi, qualité de celui (celle) qui est enclin(e) à s’occuper des autres sans préoccupation d’intérêt personnel. (En plein dans le mille. Dès la première ligne, la générosité est opposée à l’égoïsme.

    • La deuxième, c’est, je cite, « une disposition à la bienveillance, à la bonté, au pardon. »

    • Je trouve aussi « Disposition à donner largement, avec libéralité — A l’inverse de l’avarice ».

Ces trois variations nous montrent bien que la générosité est avant tout immatérielle, avant d’être matérielle. En effet, il n’est pas seulement question d’argent. Je peux être généreux en temps, en écoute, en services rendus, en attention portée à quelqu’un.

Comment être heureux ?

Nous l’avons répété plusieurs fois, nous sommes faits pour être heureux. Et plus nous sommes heureux, plus nous pouvons rendre les autres heureux. Puisque nous citons de grands hommes, je trouve que le grand philosophe grec Sénèque cerne bien notre mission. Il dit que « la fonction de l’homme est de pratiquer la bienfaisance » (Sénèque, Des bienfaits).

Alors voilà. Le tableau est vaste. Il est beau, il donne envie. Toutes les définitions convergent à souligner la dimension positive et bienfaisante de la générosité. Comme si c’était une vertu nécessaire pour être heureux.

Il est vrai aussi que nous pouvons trouver cela ambitieux.  Et puis surtout, comme nous le disions en introduction, toute cette idée de générosité et de grandeur d’âme vient chatouiller notre désir de nous recentrer sur nous-même.

Parfois nous aimerions avoir plus d’énergie, ou tout simplement l’envie d’être plus généreux. Le sentiment que nous pourrions en faire bien plus. Et vous ? vous définissez vous comme une personne généreuse ? Ou à l’inverse, aimeriez-vous l’être un peu plus ?

La difficulté d’exprimer la générosité

Pourquoi ai-je parfois du mal à être généreux ?

  • Peut-être, parce que j’ai peur de manquer ? Vous savez, c’est l’écureuil qui reste bien près de ses noisettes et qui n’a surtout pas envie de les partager avant l’hiver. C’est toujours notre bon vieil homme des cavernes et son cerveau archaïque qui stocke pour pourvoir aux besoins de sa famille. Ou encore Don Salluste, incarné par Louis de Funès dans « la Folie des grandeurs », qui est terrifié à l’idée de ne pas avoir assez d’argent.

  • En un peu moins extrême, c’est moi qui, au parc, garde la brioche dans mon sac, pour être sûre d’en avoir assez pour mes enfants (au lieu d’en proposer à leurs copains). Ce sont encore tous ces vêtements que je stocke dans mon placard, au cas où. Soit parce que j’ai bon espoir de les reporter un jour, soit parce que je n’ai pas le temps de les vendre et que cela m’ennuie de les donner, gratuitement.

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Les peurs de l’enfance

Cette peur-là, pour la déraciner, il faut remonter loin, parfois dans notre enfance. SI l’on creuse, loin, très loin, cette peur du manque est reliée à la peur de la perte.

D’après la psychanalyste Nicole Fabre, dans son livre « Peur de manquer – L’angoisse du manque, » nous mettons en place de nombreuses petites stratégies. Celles-ci nous empêchent de penser au manque.

On dit bien que la nature a horreur du vide. Pourtant le manque est fondamental, et il nous constitue depuis que nous avons vécu l’énorme séparation d’avec notre mère lors de notre naissance. Selon elle, la peur du vide se manifeste beaucoup plus dans la manière dont on le cache. On évite d être seul. Ou encore on fait n’importe quoi pour faire du remplissage. Et enfin, on garde, on stocke.

Il est facile d’imaginer ensuite que laisser partir ce que nous possédons (soit parce que nous le partageons, soit par ce que quelqu’un le réclame) est un peu crispant. Lorsque j’ai du mal à partager, à donner, je peux m’interroger sur ce que j’ai peur de perdre.

Nos blessures qui gênent notre générosité

  • Souvent, nos blessures / fêlures nous font regarder le monde à travers un prisme unique, parfois déformé. Et oui, que se passe-t-il lorsque vous regardez dans des lunettes dont les verres sont rayés ? Est-ce l’arbre qui est flou ou tordu, ou bien sont-ce les rayures qui vous induisent en erreur ? Si nous sommes plus enclins à nous braquer et à nous mettre en colère à la moindre petite pique, ou à être déçu, abandonné. Ou à nous sentir trahi, c’est peut-être parce que notre cœur a quelques blessures. C’est tellement clair ! Je pourrais dire aussi qu’une terre envahie par les ronces, un peu desséchée ou pleine de cailloux est peu propice à donner du fruit à moins d y faire un peu de jardinage !

  • Parfois, je suis imprégnée depuis longtemps par cette petite phrase que nous avons tous entendue au moins une fois dans notre vie. Vous savez, cet adage « Trop bon trop con » ? A cause de ce petit refrain qui nous habite depuis notre enfance, nous avons développé une capacité intersidérale à nous méfier. Là encore, nous retrouvons cet esprit archaïque d avoir peur de se faire avoir.

  • Tout au fond de moi, dort ce besoin de reconnaissance / de me sentir utile. Pascal Ide : « Sachons débusquer tous ces petits actes de générosité qui sont en fait de petits arrangements avec nous-mêmes / notre soif de reconnaissance / notre besoin de briller / d’être admiré / ce besoin de contrôler ? » Exemple, si je dis non à ce dossier, mon boss hésitera à me donner ma prime. Si je n’invite pas des amis à diner on pourrait dire de moi que je suis une radine.

Mes émotions

Parfois, je peux m’empêtrer dans mes émotions. Apprendre à dire non – podcast #38 J’apprends à dire non, fait-il de nous une personne moins généreuse ? Rappelez vous désaccord ne veut pas dire désamour ! De temps à autre j’ai du mal à exprimer clairement ce que je pense.

Et le résultat ressemble un peu à un sac de nœuds. Une amie me demande de prendre ses enfants un après-midi. J’aimerais bien et en même temps j’ai eu une très grosse semaine sans avoir pu passer de vrai moment avec mes enfants. En fait, j’ai peur de me sentir jugée si je refuse. Résultat, je bafouille un oui peu convaincant. Mon amie ne sait plus bien à quoi s’en tenir et moi je me retrouve coincée.

La générosité des autres

Parfois, c’est la générosité des autres qui me met mal à l’aise !

  • Parce que je peux croire que je ne mérite pas d’être aimé. Je coupe court au compliment qu’une collègue me fait sur ma coupe de cheveux, je bredouille que je n’ai pas fait grand-chose lorsque l’on me félicite pour un plat. Ou encore, quand des choses merveilleuses m’arrivent je suis persuadée que cela va s’arrêter.

  • Mais encore parce que je pense devoir absolument donner en retour, je suis inconsciemment dans un rapport « marchand ». Je pense à cette voisine qui nous a enfin demandé un service, au bout de 3 ans, juste après que nous lui ayons demandé si elle pouvait nous dépanner d’un oeuf. Nous avons senti qu’elle attendait cette occasion depuis des mois. Pourtant, nous aurions été très heureux de l’aider sans que ce soit réciproque.

  • Peut-être parce que la joie de vivre des autres me renvoie comme un miroir mes fragilités et mon incapacité à aimer plus. Alors, je critique (intérieurement ou à voix haute). Ce copain est toujours le premier à rendre service, il n’est jamais fatigué, toujours positif. Cette grand-mère qui prend tout le temps ses petits enfants et qui fait 1000 choses avec eux. Et cela m’agace ! Au fond, cela me montre nos différences et aussi nos regrets.

Je change de regard

En fait, ce dont je me suis rendue compte, au fil de mes accompagnements, c’est qu’une personne heureuse est naturellement plus généreuse. Alors la première, toute première question est celle-ci : de quoi ai-je besoin pour être plus heureux ?

Je peux prendre le temps de répondre à cette question, et la partager avec une personne de confiance. Est-ce de me sentir plus valorisée, plus aimée ? Quels sont mes besoins ? Peut-être, tout simplement, ai-je besoin de sommeil ?  De me sentir utile ?

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La générosité et l’altruisme

J’ai depuis longtemps l’intuition qu’être altruiste est plus épanouissant que d’être égoïste. Et puis cette intuition, des chercheurs l’ont scientifiquement prouvée.

Une étude scientifique sur l’altruisme

En particulier par une étude menée en 2016 par le Dr. Katherine Nelson, professeur de psychologie dans le Tennessee et publiée dans l’American Psychology Association. 473 personnes volontaires furent séparées en quatre groupes.

Chacun des groupes se fit assigner une tâche pendant six semaines consécutives. Le premier groupe fut chargé de poser des actes bons pour la planète, pour le monde en général (ramasser les déchets…). Un second fut chargé d’être particulièrement bienveillant et aidant envers ses proches (faire preuve de gentillesse comme livrer un repas à quelqu’un, rendre un service, faire une conduite supplémentaire, apporter un café…). Le troisième groupe reçut la consigne de poser des actes de gentillesse envers eux-mêmes (comme par exemple faire plus de gym, prendre un jour de congé). Et enfin, en tant que groupe témoin, le 4e groupe fut chargé de ne rien changer à ses habitudes.

Chacune des personnes remplit un questionnaire avant et après l’étude. Ce questionnaire avait pour but d’analyser leur bien-être psychologique, émotionnel et social. Il leur était aussi demandé de faire un bilan hebdomadaire de leurs émotions agréables et désagréables.

Et alors les résultats ? Sans surprise, les personnes manifestant de la bonté et de la générosité envers les autres ressentent des émotions positives, et plus largement, un épanouissement durable. Ce que nous avons trouvé plus surprenant, c’est que l’état émotionnel des personnes du 3e groupe (celles qui devaient se faire du bien à eux même), n’avait pas bougé. Ni moins, ni mieux.

Conclusion, s’offrir à soi-même ces petits plaisirs n’a pas d’impact profond sur notre bien-être tandis que prendre soin des autres l’améliore scientifiquement.

Comment faire preuve de générosité ?

Comment mieux donner alors, si cela rend plus heureux ? Et bien c’est simple. Une personne généreuse est avant tout une personne dont le réservoir d’amour est plein ! Et à partir de là c’est scientifique, physique. Il est plus facile de verser de l’eau avec une cruche remplie qu’avec une cruche vide.

Un livre merveilleux

Cela me fait penser au merveilleux livre pour enfants de Tom Rath, « How full is your bucket ? » (Je traduis : A quel point ton réservoir est-il rempli ?) qui a lui-même été adapté de la version adulte – « Foncez ! »).

Ce petit bijou illustre de manière amusante et très quotidienne la journée d’un petit garçon nommé Félix. Dès le matin, il rencontre plein de petites déceptions. Embêté par sa petite sœur, pressé par une maman stressée alors qu’il vient de se réveiller, moqué par un camarade dans le bus qui l’emmène à l’école… Autant de petites gouttes d’eau qui s’échappent du seau invisible qui flotte au-dessus de sa tête.

Son grand-père lui explique qu’en effet, nous avons tous un petit seau d’amour flottant au-dessus de nos têtes. Quand il est rempli, nous nous sentons bien. Mais quand il est plutôt vide, nous nous sentons maussade, agressif, ou triste.

Plus tard dans la journée, la tendance s’inverse pour  notre petit Félix. Après le compliment de la maîtresse, Félix ressent que son réservoir se remplit à nouveau. Puis encore à nouveau lorsqu’il vient au secours d’un enfant triste sur le banc de la cour de récré. Ou encore quand il va à la rescousse d’un plus âgé qui a laissé tomber son paquet de copies sur le sol. Et là, comme par magie, Félix réalise que contribuer à remplir le seau d’amour des autres remplit instantanément le sien.

Application

Et en fait, nous connaissons parfaitement cet adage du seau vide, du seau rempli. Mais arrivons-nous à nous en rappeler concrètement dans notre vie quotidienne ? La générosité, dans les relations humaines, c’est peut-être avant tout faire preuve de bienveillance, se mettre à la place de l’autre.

Faire preuve de générosité, pour moi, c’est par exemple replacer les choses dans leur contexte régulièrement. Par exemple, cette petite vieille dame qui me grille la place ouvertement dans la file est sans gêne au supermarché. Notre garçon qui renverse rageusement son assiette par terre. Cette amie qui ne prend pas de nouvelles ou ne propose pas son aide alors que j’en aurais tellement besoin…

Dans ce genre de situations, quelle est ma réaction ? Suis-je à cran et démarre-je au quart de tour, bien déterminée à montrer à cette petite vieille qu’elle exagère, à me fâcher auprès de mon petit garçon ? A me renfermer sur moi et à bouder parce que cette amie ne se manifeste pas ?

Je peux aussi me rendre compte que leur réservoir est peut-être un peu vide à eux aussi. Et je peux faire le choix de renverser, non pas mon assiette, mais la situation, et rester aimable. Et alors sans nul doute, cela limite les dégâts. Mieux, cela adoucit les relations !

Pour combattre l’envie / la jalousie – podcast #77

Que des belles initiatives ? Et vous qu’avez vous envie de faire ?

générosité

En bref

Si j résume,

  • Générosité bien ordonnée commence par soi-même !
  • A l’image des vases communicants, je peux donner quand je suis moi-même consciente de ce dont j’ai besoin et de ce que j’ai reçu.

  • Être généreux est tout à fait compatible avec la prudence, et la justesse

A vous de jouer chers auditeurs ! Cette semaine, je prends le temps de me demander brièvement si mon réservoir d’amour est plein. Ou bien si mon seau a une petite fuite !

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